Free Money — Mylo

Je ne savais pas exactement combien de temps j’avais attendu avant que cet homme en uniforme n’arrive. J’avais arrêté de compter le temps, mais je devais bien reconnaître que Mylo avait été rapide. Je ne pensais vraiment pas qu’il viendrait si tôt. Montana était cependant une petite bourgade, on pouvait s’y déplacer à pied ou à vélo sans prendre le risque de s’épuiser.

Il me fit sortir de cette cellule dépourvue de propreté et me mena à l’entrée du poste de police. Là-bas, il retira les menottes qu’il m’avait enfilé lorsque j’avais quitté la cage. Je massai doucement mes poignets, lâchant également un signe de la main à Mylo qui patientait un peu plus loin.

Je pus récupérer mes effets personnels comme mon téléphone portable et mes cartes de crédit. Ma veste de costume et ma ceinture également. Heureusement que je n’avais pas de chaussure à lacets, sinon j’aurais été quitte pour les enfiler et perdre encore d’avantage de temps.

- Merci bien ! Je te fais la transaction immédiatement !

N’aimant pas être redevable, je fis un virement Paypal de quatre milles dollars sur le compte de Mylo. Heureusement que son compte était enregistré grâce à nos rendez-vous professionnels.

- Quelle histoire ! soupirai-je. Figure toi que je n’ai plus mes papiers d’identité. Il leur en faut peu pour embarquer quelqu’un !

J’omis volontairement de signaler la dispute avec mon frère, mais décidai toutefois d’en toucher quelques mots tout en ajustant la montre à mon poignet.

- Caleb est encore responsable de cette situation. Etonnant n’est-ce pas ? Il n’a rien trouvé de plus correct que de faire violence au milieu de la rue. Bref, ça mérite un bon café, tu ne crois pas ?

Avec soulagement, je terminai de boutonner ma veste et sortis de celle-ci un nettoyant sans savon que j’appliquai sur mes mains. J’en proposai à Mylo avant de ranger le petit tube à sa place habituelle. J’étais à présent prêt pour quitter les lieux qui, de toute évidence, n’allaient pas me manquer.

J’espérai que les médias n’auraient pas vent de cette histoire, et je fus soulagé de ne voir aucun journaliste à la sortie du poste.

Lorsque Mylo effleura l’idée que mes papiers d’identité puissent être à son atelier, je me figeai. Bien sûr, c’était fort possible. Je ne savais pas où ils pouvaient se trouver, étant donné que j’avais été embarqué directement au poste de police. Je n’étais pas repassé chez moi. Peut-être qu’ils y étaient, peut-être pas. En vérité, ce n’était pas quelque chose qui m’inquiétait. Je connaissais des personnes dans l’administration, et elles pouvaient accélérer le processus. Néanmoins, cela m’agaçait.

- Fort bien ! J’espère qu’ils y sont. Je n’ai pas regardé chez moi, mais on se tient au jus.

Mon téléphone toujours en main, je sentis le vibreur contre ma peau. « Transaction achevée avec succès. » Un petit sourire s’afficha sur mon visage tandis que je rangeai le cellulaire dans ma poche.

- L’argent est à présent sur ton compte.

A nouveau, je tournai les yeux vers mon ami tout en souriant. J’étais à jour de mes dettes, en prime d’un petit cadeau pour le remercier de m’avoir sorti de cette délicate situation. Je me raidis un peu lorsqu’il posa la question de ce dont Caleb avait écopé. Rien, évidemment. Quel enfoiré.

- C’est un bon charmeur quand il veut, il s’en ait sorti avec un simple avertissement de la flic.

Je soupirai bruyamment tout en récupérant le tube de gel. Dans le reflet de la porte vitrée, je réajustai ma cravate, et suivis finalement Mylo hors du commissariat. Un café se trouvait non loin d’ici. Je constatai la voiture de mon ami garée sur le parking de la place. La mienne se trouvait bien entendu au sous-sol de la maison dans laquelle j’habitais. Si j’avais opté pour un loft lors de mon installation, j’avais finalement décidé de l’acheter et de louer, afin d’acquérir une spacieuse villa avec piscine et jacuzzi. J’avais besoin d’espace.

Il ne faisait pas véritablement froid ce jour-là, mais la neige rafraîchissait cette vallée montagnarde. On pourrait y respirer à plein poumon, contrairement à Manhattan qui survivait au dessous d'un nuage de toxines. Nous nous installâmes toutefois dans le café. Quelques rares individus se trouvaient sur la terrasse, et l'intérieur n'était pas totalement rempli non plus. Nous trouvâmes rapidement une place, près de la vitre et du chauffage.

- Un café viennois s’il vous plait. Et toi, Mylo ?

Mon bon Mylo, si tu savais ... Caleb était un excellent charmeur et manipulateur, qui parvenait à ses fins quelque soit le problème. J'avais tout fait pour m'éloigner et le voilà qui se ramenait dans cette ville perdue au milieu de nulle part. Ce n'était pas bien compliqué de savoir où j'étais, surtout avec cette stupide émission qui était passée quelques temps à Montana. Malgré tout, j'avais réussi à le tenir loin de moi durant plusieurs mois. De longues semaines de tranquillité où j'avais pu goûter à la vie de mon propre chef. Il n'avait plus cherché à me contacter en voyant que j'avais bloqué tous ses numéros et ses adresses. Et maintenant, le voilà qui se pointait comme une fleur. Or, ça ne présageait rien de bon. Caleb n'apparaissait pas comme ça, sans raison.

- Contrarié par l'arrivée de cet idiot prétentieux, et maintenant par cette stupide interpellation. Si l'on enlève ces deux éléments, c'est plutôt correct. J'ai besoin de m'aérer l'esprit, un gros dossier pour Seattle me prend la majorité de mon énergie. Et toi, comment tu vas ?

Je n'étais pas un vrai bavard, mais je savais reconnaitre les amis des profiteurs. Je ne disais rien qui puisse me nuire, et je savais que Mylo ne connaissait pas mon frère. Je ne risquais donc rien à me laisser un peu aller. Quelques minutes après, la serveuse revint avec notre commande. Je ne fus pas surpris de ne pas y trouver l'addition. Généralement, les cafés espéraient toujours que les clients se laissent tenter par une autre douceur, et il fallait alors demander la note au moment de quitter les lieux. Je m'installais un peu mieux dans mon siège, tournant la petite cuillère dans ma tasse, attendant que celle-ci refroidisse.